Bicentenaire de la mort de Toussaint Louverture
[Discorso di S. E. Mons. Serge Joseph Miot, Arcivescovo di Port-au-Prince, per commemorare il Bicentenario della morte di Toussaint Louverture. Cattedrale di Port-au-Prince, 7 aprile 2003]
Introduction
Je salue ce matin en cette Cathédrale la présence de son Excellence Le Président de la République et de la Première Dame.
Je salue la présence du Nonce Apostolique et des autres membres du Corps Diplomatique en Haïti.
Je salue la présence des Excellences des Evêques assis au chœur de cette enceinte.
Je salue la présence du Premier Ministre et des Membres du Gouvernement.
Je salue les honorables Membres du Corps législatif.
Je salue les Membres de la Haute Cour de justice et du Corps judiciaire.
Je salue les personnalités policières, civiles et religieuses.
Frères et Sœurs bien-aimés,
Nous sommes tous rassemblés dans cette Eglise pour faire mémoire d’un grand homme et d’un grand Chef d’Etat, décédé depuis 200 ans nommé Toussaint Louverture. Nous sommes rassemblés pour prier et méditer. Nous sommes aussi rassemblés pour prendre conscience de notre responsabilité de chrétiens et d’être humains. Parfois nous nous rendons compte que nous ne sommes pas toujours à la hauteur de cette responsabilité. Nous n’avons pu faire tout ce que nous devrions faire pour un frère et pour une sœur. Souvent nous commettons des péchés par omission et par négligence. Nous voulons demander pardon au Père de toute bonté et de toute justice. Nous allons implorer sa grâce et sa miséricorde pour faire de nous tous, de chacun de nous et de chacune de nous, des fils et des filles dignes de lui, des frères et sœurs de la grande famille humaine. Humblement et sincèrement demandons pardon au Seigneur.
7 Avril 1803 – 7 Avril 2003
BICENTENAIRE DE LA MORT DE TOUSSAINT LOUVERTURE
au Fort de Joux au Mont du Jura en France
EF
1-. C’est au Fort de Joux, au Mont du Jura en France que mourut Toussaint Louverture le 7 avril 1803 dans un cachot humide et froid. Cette cellule de Prison ne convenait pas du tout à un Indigène venu des Tropiques.
2-. Après son arrestation, en prenant le bateau de l’exil, Toussaint Louverture nous a légué ces paroles mémorables : « en me renversant, vous avez abattu l’arbre de la liberté des Noirs, il repoussera parce que ses racines sont profondes et nombreuses ».
3-. Toussaint Louverture nourrissait dans son âme profonde le sens des valeurs et du discernement. Selon lui, Dieu est la valeur suprême et la liberté a été donnée à l’homme pour choisir librement Dieu comme valeur suprême de la vie et de l’existence. Il n’est pas donné à tout homme ce sens de discernement, cette sagesse profonde. Et le choix de Toussaint a été radical et déterminant. C’est au nom de ce Dieu, Amour miséricordieux, Seigneur et Maître de l’histoire, qu’il s’est lancé dans une lettre sans merci pour la libération de ces hommes noirs, condamnés à la servitude, ses frères de race et de sang.
4-. « Liberté ou la mort » va devenir le slogan de l’Armée Indigène ayant désormais à sa tête, Jean Jacques Dessalines, un autre génie de la race, à sa mesure et à sa façon, héritier direct du premier des noirs, cet homme de tous les temps.
5-. Daniel Rops (1901 – 1965), écrivain français, auteur de nombreux ouvrages d’histoire religieuse ne trouva pas mieux de comparer Toussaint Louverture à Moïse, homme de Dieu, grand prophète et libérateur des Juifs de l’esclavage d’Egypte .
6-. Ainsi donc, le nom de Toussaint Louverture est consacré dans l’histoire universelle, dans l’histoire de toute l’humanité.
7-. Toussaint Louverture fut le stratège par excellence. Grâce à son génie, à sens de discernement, il a su s’arranger pour apprendre les tactiques guerrières des trois puissances colonialistes et impérialistes qui régnaient dans l’ Ile saint-domingoise, à savoir la France, l’Espagne et l’Angleterre. Fort de cette expérience guerrière, il va les mettre dos à dos, permettant à l’Armée Indigène de les vaincre sur le champ de bataille.
8-. Toussaint Louverture considérait tous les noirs comme ses frères. Il les respectait et les aimait. Ils s’adressait à ses soldats en les appelant : « frères et amis ». Où est-ce qu’il a appris ce concept de fraternité ? C’est le grand débat dans l’actualité politique internationale contemporaine.
9-. Le Professeur Antonio Maria Baggio, le Responsable du Département d’Ethique Publique à l’Université Pontificale Grégorienne de Rome, a inaugurée avec nous le 21 mars 2002, dans un Congrès International, l’Ecole de Formation à l’Engagement Socio-Politique Toussaint Louverture ( ETL). D’après les recherches du Professeur Baggio et c’est également sa profonde conviction, Toussaint Louverture fut un politicien au sens moderne du mot.
Il s’est donné pour tâche, ce professeur Baggio, de faire connaître Toussaint Louverture aux grands politiciens modernes justement dans l’approfondissement de la notion de fraternité comme concept et catégorie politique. Le professeur Baggio a écrit : « Haïti a trop souffert pour la fraternité . C’est d’Haïti que doit partir le message pour la fraternité universelle ».
10-. L’Ecole de Formation à l’Engagement Socio-Politique Toussaint Louverture se donne pour vocation et mission la noble tâche de perpétuer la mémoire de son Patron en approfondissant la fraternité comme concept politique et en invitant tous les Haïtiens dans la combite pour la fraternité universelle.
11-. Même si l’ETL est encore au stade embryonnaire, elle fait partie du grand réseau international de la : « Res Nova » – L’ETL est également invitée à participer à un Congrès Internal sur la Culture qui se tient à Gênes en janvier 2004. Elle est également invité à autre Congrès International sur la politique contemporaine à Caracas – Vénézuela au cours de l’année 2004.
12-. L’ETL a influencé la Pastorale Universitaire de l’Archidiocèse de Port-au-Prince qui a lancé un concours de chants sur la « Fraternité créole » La SAPHA (Solidarité avec les Pauvres d’Haïti) a le projet de bâtir une Cité où tous les habitants vont se mettre à l’Ecole de la fraternité comme le faisaient les Premières Communautés chrétiennes dont parlent les Actes des Apôtres.
13-. Comme je l’ai déjà dit en maintes occasions je fais confiance à l’homme haïtien et je crois fermement au miracle haïtien. Le peuple haïtien a déjà plus d’une fois émerveillé le monde au cours de son histoire – Et son secret réside dans la fraternité, la solidarité, « l’union fait la force ». Chaque fois que le peuple haïtien arrive à découvrir l’ennemi commun il ramasse ses forces et comme d’un seul homme il se lance à l’assaut contre cet ennemi. Il sort toujours vainqueur..
14-. Aujourd’hui, l’ennemi commun, c’est la misère. Et celle-ci est chronique et multiforme : spirituelle, morale, politique et économique. Ses tentacules sont dissémineés dans toutes nos couches sociales. Elle est la cause de toutes nos divisions et même de cette crise institutionnelle et politique. Ce qui nous manque est un leadership éclairé, un leader de la trempe de Toussaint Louverture pour faire face à cette crise. Le message de la fraternité doit partir d’Haïti. Comme aimait le répéter Toussaint Louverture : nous sommes tous frères, descendants d’une même race, héritiers d’une culture commune, notre culture nègre et créole. Je me souviens de cette phrase de Léopold Seghor , à l’inauguration du Premier Festival Nègre à Dakar , en présentant l’œuvre fondamentale de Price Mars « Ainsi parla l’Oncle » et disait : « Price Mars nous a sauvés ».
15. Haitiens, mes frères, patriotes vivant au pays et en dehors du pays. Je lance un autre appel au rassemblement National. Le moment est grave. Notre pays est en danger. Notre souveraineté nationale est menacée. La solution de notre crise chronique nécessite le grand discernement vers le dépassement personnel et collectif. L’heure est plutôt à la réconciliation et au pardon. Nous devons nous pardonner mutuellement et réciproquement. Nous sommes tous des frères et Sœurs d’une même nation, d’une patrie commune, notre chère Haïti.
Haïti cheri se ladann poun mouri nan pwen tankoul, nan pwen pasel.
Haïti appartient à tous les haïtiens, à toutes les haïtiennes. L’heure est au rassemblement. Chacun doit apporter sa pierre personnelle à la construction de l’édifice commun.
Nan pwen chak koukouy klere pou jel – Nnan pwen zafè mouton pa zafè kabrit. Nan pwen Borik travay pou chwal garyonnen.
Nous sommes les descendants de Toussaint Louverture, de Jean-Jacques Dessalines, d’Henri Christophe et d’Alexandre Pétion.
16-. Frères et Sœurs d’Haïti Thomas, nous sommes à environ 250 jours du 1er janvier 2004 – je prends la responsabilité de le dire publiquement : si le 18 mai 2003 doit se célébrer dans cet état d’esprit, la fête du Bicentenaire de l’Indépendance est déjà compromise. Il est encore temps pour ce rassemblement patriotique et national, car le miracle haïtien est toujours possible. Nous ne devons rien ménager pour le rendre possible et actuel.
17-. Dores et déjà, je félicite et remercie sincèrement et fraternellement tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté qui écoutent ma supplique et vont daigner l’exaucer. Cette supplique vient d’une âme qui souffre profondément mais pleine de confiance et d’espérance chrétienne. S’il est prématuré de réitérer le Congrès de l’Arcahaie de 1803, n’est-il pas opportun de consentir une trêve nationale et patriotique pour pouvoir célébrer le Bicentenaire de notre Bicolore dans la paix et l’unité.
Ainsi donc, je vous salue tous patriotiquement et fraternellement au nom de notre frère de race et de notre ancêtre commun, Toussaint Louverture dont nous célébrons aujourd’hui la mémoire toujours vivante du Bicentenaire de la mort survenue au fort de joux le 7 avril 1803.
Puisse son âme héroïque reposer en paix par la miséricorde de Dieu de la vie : Père, Fils et Esprit Saint Amen !